Quoi de mieux que l’ex-tour Adria, rebaptisée Hopen, pour servir de décor au nouveau film de Sylvain Desclous, « Le Système Victoria ». Adapté du roman d’Éric Reinhardt paru en 2011, ce thriller amoureux sort en salles ce mercredi 5 mars.
Directeur de travaux, David Kolsky (incarné par Damien Bonnard) tente tant bien que mal de mener à terme le chantier d’une imposante tour à La Défense. Retards en cascade, problèmes à répétition, pression du promoteur odieux… : rien ne lui est épargné. Mais alors que tout semble s’effondrer autour de lui, sa rencontre avec Victoria (Jeanne Balibar), une énigmatique DRH d’un grand groupe, bouleverse sa vie et l’entraîne dans une passion amoureuse aussi intense que troublante.
Dans ce drame, un troisième protagoniste s’impose : la tour elle-même. Et ce gratte-ciel existe réellement. Il s’agit du chantier de rénovation de la tour Hopen, qui achève sa métamorphose. Rarement ouverts aux tournages -et encore moins à ceux du cinéma-, les chantiers de cette envergure sont généralement inaccessibles. Après avoir exploré les sites de rénovation de la tour Pleyel à Saint-Denis et de construction de la To-Lyon à Lyon, Sylvain Desclous a convaincu les équipes d’Eiffage Construction ainsi que le propriétaire Praemia REIM (ex-Primonial) d’accueillir son tournage.
Une aubaine, car c’est bien à La Défense que le réalisateur voulait situer son intrigue. « La Défense était le lieu idéal. C’est un quartier d’affaires international très identifié qui traduit parfaitement l’intention du film : se rapprocher de l’incarnation du système économique capitaliste, confie Sylvain Desclous. J’aime beaucoup l’un des plans du film où l’on voit David passer un coup de fil tout en haut de la tour : le soleil couchant se reflète sur la façade vitrée d’une tour voisine tandis qu’un avion trace une ligne blanche dans le ciel. C’est très visuel. Et je trouve que La Défense est un quartier très graphique ».
L’histoire de ce building semble d’ailleurs avoir dépassé la fiction. Lors de sa construction, à la fin des années 90, le chantier avait été brutalement interrompu pour des raisons économiques, entraînant par ailleurs les déboires judiciaires du célèbre promoteur Christian Pellerin. « Je n’étais pas au courant de toutes les vicissitudes et avanies qu’a subie la tour. Évidemment quand je l’ai appris j’ai trouvé ça vertigineux et cocasse à la fois. Je me suis dit que le film tapait juste et que cette tour était décidément une magnifique métaphore du monde moderne », indique Sylvain Desclous.
Plus récemment, en 2023, alors que les travaux de modernisation battaient leur plein, un spectaculaire accident de grue a brièvement paralysé le chantier. Un incident survenu quelques mois avant le début du tournage, qui n’a finalement eu aucune conséquence majeure… et qui a même arrangé le réalisateur.
« Cet accident -heureusement sans gravité autre qu’économique et financière- a permis, par un de ces clins d’œil du destin, le tournage du film. En effet, la tour a pris quelques mois de retard et a conservé sa façade nue, ce dont j’avais absolument besoin pour raconter le chantier d’une tour en construction. La plupart des autres sites que j’avais repérés avançaient trop vite et auraient été recouverts avant le début du film », rajoute le réalisateur.
Un événement hors du commun et extrêmement visuel que le réalisateur aurait pu intégrer à son œuvre. Mais il a finalement préféré s’en abstenir. « Je craignais que cela ne paraisse trop gros pour être vrai. Et puis, cela n’aurait pas collé au calendrier du chantier du film, notamment en raison de la réalisation du second œuvre », poursuit-il. D’ailleurs, si le film n’embarque pas beaucoup d’effets visuels, une seconde grue virtuelle a été ajoutée, tout comme un habillage final de la façade.
Tourné durant l’été 2023, le film a nécessité une organisation minutieuse sur le chantier. Sylvain Desclous explique avoir dû travailler avec une équipe réduite afin de ne pas perturber des travaux déjà bien en retard. « Nous avons beaucoup tourné en fin de journée pour profiter de la beauté des lumières tombantes et du calme du chantier, une fois les ouvriers partis. Tout d’un coup, le site devenait silencieux, ce qui permettait de tourner certaines scènes dialoguées », insiste le réalisateur, qui ne cesse de remercier les équipes d’Eiffage Construction et de Praemia REIM pour cet accueil inédit.
Si « Le Système Victoria » a été en grande partie tourné sur le chantier de la tour Hopen, certaines scènes censées se dérouler dans la tour achevée ont été filmées au sommet de la nouvelle tour Aurore. Le reste du film a été tourné entre Bruxelles et Paris.
